14/09/2009 EXCLUSIF. Interrogé par TÊTU pour son parrainage d'un film sur l'homoparentalité, Jack Lang nous révèle son intention de proposer une loi pour que les homos en tant que couples, et non plus seulement en tant que «célibataires», puissent obtenir un agrément d'adoption. La semaine dernière, Jack Lang était l'invité surprise de la Mostra de Venise. Il venait y parrainer le film L'amore e basta («L'amour, c'est tout») de Stefano Consiglio, un documentaire italien dans lequel neuf couples homosexuels racontent leur histoire d'amour. TÊTU a donc souhaité interroger à ce sujet le député du Pas-de-Calais, ancien ministre de la Culture puis de l'Education. A cette occasion, il nous a révélé souhaiter modifier la loi qui empêche aux homosexuels de faire une demande d'adoption en tant que couple. Entretien. TÊTU: Pourquoi avoir parrainé ce film sur l'homosexualité? Jack Lang: L'équipe du film m'a demandé d'accompagner le lancement de ce film à la Mostra et plus largement en Italie. J'ai été touché pas la simplicité de ce film, qui est un ensemble de témoignages sur des couples qui racontent chacun leur propre histoire d'amour. Il y a une authenticité, une vérité. On ne peut pas y rester insensible. Il y a d'ailleurs ce témoignage très émouvant d'un couple de femmes françaises, dont l'une avait pu donner naissance à un enfant par insémination artificielle en Belgique. L'autre disait: «Si mon amie, qui a donné naissance à notre enfant, disparaissait, moi qui aurais été la «co-maman» de cet enfant, je perds tout droit sur lui. Cet enfant m'est arraché.» C'est inacceptable. Je vais d'ailleurs reprendre ce combat. C'est-à-dire? La législation française est complètement abracadabrante: un célibataire a le droit à l'adoption, s'il remplit bien sûr les conditions. Mais un couple d'homosexuels n'a pas ce droit. J'ai l'intention d'écrire une proposition de loi. Sans doute quelque chose de très court, seulement un article. Pour que, s'il est adopté bien sûr, le droit accordé aux célibataires soit aussi accordé aux couples. C'est humainement très important. Aujourd'hui, il y a des dizaines de milliers d'enfants qui sont dans cette situation et qui risquent d'être privés, en cas de disparition de la personne qui les a enfanté, de l'autre parent. Donc il serait souhaitable de changer cette situation. C'est un geste simple, qu'il faut accomplir. D'autant plus que la Cour européenne des droits de l'homme a déjà condamné la France à ce sujet, pour le cas d'Emmanuelle B., qui n'avait pas caché son homosexualité en faisant une demande d'agrément… Oui, il faut mettre fin à cette anomalie. Le plus rapidement possible sera le mieux. Je ne sais pas si j'y parviendrai, mais je compte, dans les prochaines semaines, écrire cette proposition de loi en tant que parlementaire, que j'enverrai à tous les députés. Pour revenir au film que vous avez parrainé, votre action intervient dans un contexte très dur pour les homosexuels italiens, et notamment à Rome, dont le maire vient d'annoncer une manifestation nocturne contre «l'intolérance». Cet homme, Gianni Alemanno, est très à droite, et tient un langage populiste qui fait des ravages et qui a pu, en effet, allumer des feux dangereux.Cette manifestation ne semble pas expliciter la lutte contre les violences faites aux femmes, aux homosexuels, aux gens les plus pauvres, aux jeunes… Le maire de Rome cultive volontiers la démagogie, l'électoralisme, le populisme. Bien sûr, il ne lui est pas interdit de changer... Votre présence à Venise, est-ce un message adressé aux Italiens dans ce contexte? J'ai été invité. En Italie, je bénéficie de sympathies en raison des liens très étroits que j'ai établis avec les cinéastes italiens, des hommes de théâtre, des écrivains... J'ai moi-même été pendant deux ans directeur du Piccolo teatro de Milan... Ce serait abusif de dire que l'Italie est ma deuxième patrie, mais en effet, les paroles que je peux y prononcer sont répercutées. J'espère modestement contribuer à faire bouger les choses en Italie. Ce n'est pas la première fois que vous combattez l'homophobie… Je me bats pour la reconnaissance de la diversité sexuelle, pour l'égalité sexuelle. J'essaie de le faire là où je suis. Comme ministre de l'Education nationale, j'ai pris une série de mesures pour lutter contre l'homophobie, contre le sexisme. L'école a un grand rôle à jouer. En France, nous avons connu quelques progrès: dès l'élection de François Mitterrand, la sanction qui pénalisait certains homosexuels a été abolie, le pacs que nous avons fait voter... Je pense qu'il faut aller plus loin. C'est pour cette raison que je suis favorable à la reconnaissance du mariage et du droit à l'adoption d'enfants par les homosexuels. Vous qui avez été ministre de la Culture puis de l'Education, pensez-vous que le cinéma soit un bon moyen d'éduquer les gens contre l'homophobie? A l'école, j'ai demandé par des circulaires que, dans le cadre de cours sur la sexualité, l'homosexualité soit présente au même titre que l'hétérosexualité. C'est important, là, que l'école occupe pleinement son rôle d'école de l'égalité. Quant au cinéma, il y a des films qui peuvent contribuer à faciliter l'émergence d'une conscience plus ouverte. Je pense en particulier au film israélien Tu n'aimeras point, que je viens de voir. Voilà un film assez émouvant et touchant qui peut ouvrir les yeux. D'ailleurs, son titre en anglais est Eyes Wide Open… |
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