03/02/2011 En appel, la circonstance aggravante d'homophobie a été retenue même si des insultes n'avaient pas été prononcées. Une première. L'agression avait eu lieu en 2007 sur un lieu de drague. Explications. En condamnant deux garçons accusés d'agression homophobe sur un lieu de drague gay en 2007, la cour d’appel d’Orléans, va, sans aucun doute, faire jurisprudence. En première instance, le tribunal correctionnel de la ville avait d'abord rejeté la circonstance aggravante d’homophobie, au motif que les coups portés à Etienne (prénom modifié) par une dizaine de jeunes gens n’avaient pas été accompagnés d'insultes. Les juges de première instance avaient en cela donné raison à la plaidoirie de l’avocat des deux garçons incriminés, Fabien et Fabakari, qui s’appuyait sur une lecture très restrictive de l'article 132-77 du Code pénal qui indique que la circonstance aggravante d'homophobie est reconnue seulement si l'infraction est accompagnée d'insultes homophobes. Pour l’avocat des accusés, le caractère homophobe des violences commises en réunion n’est donc pas prouvé, pas plus que, selon lui, ne pourrait être qualifiée d’antisémite l’agression de lycéens devant un lycée juif... «Procès d'intention» contre l'évidence N’acceptant pas cette interprétation a minima de la loi, le parquet avait fait appel de ce jugement qui, en outre, déboutait le Groupe action et lesbien du Loiret (GAGL) de sa capacité à se porter partie civile. De surcroît, un mineur jugé séparément quelques mois plus tôt pour les mêmes faits avait, lui, écopé de la circonstance aggravante. Au «procès d’intention» dénoncé par avance par la défense, ministère public et partie civile se sont évertués a démontrer que, même sans insulte, l’acte avait été commis très intentionnellement, s’appuyant pour cela par les déclarations faites par de nombreux témoins et notamment d’autres jeunes ayant, pour le moins, assisté à la scène mais qui n’étaient pas poursuivis. Retournement en appel Finalement, un arrêt très motivé par le président de la Coup d’appel infirme le jugement du tribunal correctionnel: il reconnaît, malgré l’absence d’insultes, le caractère homophobe de l’agression, et réhabilite du même coup le GAGL dans son intérêt à agir. Les trois juges ont condamné conjointement Fabien, Fabakari ainsi que les parents du mineur à verser 1.000 euros à titre provisionnel sur les dommages et intérêts dus à Etienne et à prendre en charge les frais de justice. Le Cour a enfin confirmé les peines de prison avec sursis, suivant en cela la partie civile qui ne demandait pas que la reconnaissance du caractère homophobe fût accompagnée d’une aggravation de la sanction. L’émotion était forte au sortir de la salle d’audience ce 1er février. «C’est bien d’avoir tenu» lancera à Etienne en larmes, une militante du GAGL. L'avocate d’Etienne et du GAGL, Anne Paladino, notera quant à elle «le grand respect» avec lequel la cour a prononcé son arrêt. «C’est historique dans le droit français, s’est exclamé Denis Lefèvre, le président de l’association LGBT. Cette décision était attendue par des copains partout en France. C’est une très grande satisfaction, cela va inciter des victimes à se déclarer.» Même s'il a «du mal» à se réjouir «que trois jeunes de 18-20 ans aient pu être amenés à commettre de tels actes». Pour lui, cela donne toute sa pertinence à l’action menée en milieu scolaire – par le GAGL notamment - pour lutter contre l’homophobie des jeunes. Et l’urgence à l’intensifier. |
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