16/02/2012 Pour l'élu du Nord, ce sont les homosexuels, et non ses propos, qui sont à l'origine du tollé contre lui. Le point sur le débat sur la déportation homosexuelle, et les réactions de la journée. MIS À JOUR avec la réaction de Nicolas Sarkozy sur TF1. Pour Christian Vanneste, le responsable de la bronca contre lui est tout désigné: c'est encore une fois le «lobby gay», celui qui le «poursuit de ses assiduités, depuis cinq ou six ans. (…) A l'UMP, ils se disent: “le lobby est contre nous, il faut réagir!”» Ce n'est pourtant pas d'une émanation particulièrement homo, mais bien du «Lab» d'Europe 1, qu'est sortie l'info qui aura marqué l'actualité de cette journée d'avant-déclaration de candidature de Nicolas Sarkzoy: les déclarations du député UMP sur «la légende de la déportation homosexuelle». Klarsfeld défend Vanneste Celui qui assure s'être «battu pour les représentants homosexuels soient présents lors des commémorations de la Seconde guerre mondiale» dénonce son exclusion annoncée (mais pas confirmée) de l'UMP. Tout en condamnant «absolument cette déportation horrible» des homosexuels, il maintient qu'aucun homosexuel n'a été déporté de France. «Si je me suis trompé, je ferai amende honorable, il n'y a pas de problème», affirme-t-il. Or, même si rien dans l'actualité n'imposait subitement ce débat, la polémique a permis de faire apparaître certaines données, parfois contradictoires, sur l'état des recherches sur la persécution des homosexuels français durant l'occupation nazie. Serge Klarsfeld, président de l'association des Fils et filles de déportés, défend les propos du député du Nord au site d'extrême-droite Nouvelles de France: «En Allemagne oui (il y a eu des déportaions d'homosexuels), mais pas en France. Les lois allemandes n'ont pas été étendues à d'autres pays. Il n'a jamais été question de déporter des homosexuels français. Je n'ai jamais entendu dire que l'on arrêtait des gens parce qu'ils étaient homosexuels.» 62 déportés homos français Pourtant, l'historien Mickael Bertrand est moins catégorique. Il cite l'ouvrage intitulé La déportation pour motif d'homosexualité en France: débats d'histoire et enjeux de mémoire (éditions Mémoire active) qui recense 62 déportés français –tous des hommes– pour homosexualité, dont 22 arrêtés en Alsace-Moselle, 32 au sein du Reich (hors Alsace et Moselle), un dans un lieu indéterminé et sept en zone occupée. Au moins 13 ont trouvé la mort en déportation. «Il y en a vraisemblablement plus, mais cela se joue à quelques dizaines, a-t-il dit à l'AFP. «Il est littéralement obsédé par ce sujet.» Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu de déportés homosexuels pour d'autres motifs parce qu'ils étaient juifs, résistants…» Mais pourquoi absolument circonscrire le débat à la France? «Pour tous ceux qui aiment la liberté, dont nous sommes, l'Alsace et la Lorraine sont demeurées la France entre 1940 et 1944» écrit le Mémorial de la déportation homosexuelle, qui «condamne le délire obsessionnel contre les homosexuels de Christian Vanneste» et envisage des poursuites judiciaires – il encourt un an de prison et 45.000 euros d'amende, rappelle l'avocate Caroline Mécary. Un comptage complexe A l'échelle européenne, on estime en général 60.000 homosexuels emprisonnés, et une partie – entre 15.000 et 30.000 – déportés. «L'évocation de ces chiffres m'accable. Rapportés aux propos de Christian Vanneste, ils me révoltent, écrit l'adjoint au maire de Paris Christophe Girard. Déjà condamné en première instance il y a quelques années, il fut hélas blanchi par la Cour de Cassation. C'est aussi la preuve que l'article de loi condamnant les propos homophobes est très largement insuffisant en l'état.» Pour sa part, les "Oublié-e-s" de la Mémoire (Association homosexuelle du devoir de mémoire) ajoute que «la déportation des homosexuels dans son ensemble concerne d'abord et avant tout les Allemands et touche aussi d'autres nationalités de façon marginale (étrangers résidant sur le sol allemand - cas de Rudolf Brazda notamment - ou encore ressortissants d'autres nationalités arrêtés dans les pays occupés et envoyés en camp de concentration, le plus souvent pour des raisons plus arbitraires qu'objectives, voire pour l'exemple). On dénombre ainsi des cas de déportés pour homosexualité parmi les ressortissants polonais, tchécoslovaques, soviétiques, norvégiens, mais aussi quelques Français.» Au Nord, le tollé aussi Des élus du Nord, terre de Christian Vanneste, ont réagi: «Je ne peux être qu'indigné et choqué face aux propos de Christian Vanneste qui s'en prend, une nouvelle fois, à la communauté homosexuelle, dit Michel-François Delannoy, maire PS de Tourcoing, qui avait battu Christian Vanneste dès le premier tour des municipales de 2008. Il est littéralement obsédé par ce sujet. Les affirmations sont très graves, mais, plutôt que d'entrer dans cette polémique destinée à faire diversion, je préfèrerais entendre le député UMP sur le bilan de Nicolas Sarkozy.» Même le sénateur UMP Jean-René Lecerf, qui décrit Christian Vanneste comme un «militant gaulliste exemplaire» et un «remarquable adjoint à la Culture à la mairie de Tourcoing», estime qu'il a «dépassé la ligne jaune un nombre incalculable de fois» et que ses derniers propos posent «un problème d'éthique et de morale». «A l'UMP, il y a des gens de trop. Soit on exclut Christian Vanneste, soit il reste et un certain nombre de gens, dont moi, s'excluront eux-mêmes du parti», ajoute-t-il. On est pourtant loin du «lobby gay»… NICOLAS SARKOZY RÉAGIT LORS DE SON INTERVIEW SUR TF1 Suite à la polémique de la journée, Nicolas Sarkozy a dû réagir ce soir sur TF1, lors de l'interview de déclaration de sa candidature, aux propos de Christian Vanneste. Condamne-t-il ces propos? «Oui, a-t-il répondu. J'aimerais tellement que dans la vie politique, à gauche comme à droite, on arrête avec ces propos blessants qui n'amènent rien», a déclaré le président de la République. M. Sarkozy a rappelé qu'il était opposé au mariage homosexuel et à l'adoption par des couples homosexuels. Mais «tout ce qui peut paraître de près ou de loin de l'homophobie, je l'ai en horreur. Par conséquent, on n'a rien à faire avec des personnes qui ne comprennent pas qu'au 21e siècle, ce type de propos, ça tire tout le monde vers le bas», a-t-il déclaré, sans être plus précis sur le traitement à réserver à Christian Vanneste. |
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