18/12/2012 DANS LE VESTIAIRE DES FILLES. A la veille de la manifestation du 16 décembre pour l'égalité des droits, TÊTUE donne la parole à une sportive engagée: Christelle Foucault, présidente de la Fédération Sportive Gay et Lesbienne, qui appelle officiellement à manifester. En soutenant clairement le droit au mariage pour tous, l'ancien capitaine de l'équipe de France de football Lilian Thuram a donné une belle preuve cette semaine que le monde du sport n'était pas déconnecté de la société. Il ne l'est d'ailleurs tellement pas, y compris au sein de la communauté LGBT, que ce Vestiaire publié à la veille de la grande manifestation du 16 décembre revêt pour l'occasion des couleurs un peu particulières. Militantes? Politiques? En tout cas celles de la Fédération sportive gaie et lesbienne (FSGL), qui a elle aussi lancé un appel à manifester. Pour faire entendre sa voix citoyenne. Plus qu'agacée par la violence des propos tenus par les anti-mariage pour tous, sa présidente Christelle Foucault s'explique. Parce que le sport peut être un magnifique outil de lutte contre les discriminations. TÊTUE.com: Pour quelles raisons la FSGL a-t-elle lancé cet appel à manifester dimanche à Paris? Christelle Foucault: Parce que la situation sociale et politique des homosexuels en France nous semble à un tournant historique. Parce que la FSGL, bien qu'apolitique, a tout de même un objet militant dans ses statuts: la lutte contre les discriminations par la pratique sportive. La fédération a toujours eu pour objectif d'oeuvrer pour une meilleure visibilité des homosexuels dans la société. Or, au lendemain des manifestations contre le mariage pour tous de novembre, la communauté homosexuelle est apparue en danger. On s'en prenait ouvertement à notre intégrité, des propos homophobes étaient proclamés dans l'espace public, des idées d'un autre temps étaient véhiculées. Le pourquoi on se bat tous les jours, l'égalité des droits, un traitement équitable, non discriminant, tout cela était tout d'un coup bafoué, piétiné, renié par une frange de la population violente à qui on donnait la parole... Il nous a paru important dans ce climat de nous lever, aux côtés des autres associations LGBT, pour rappeler qu'on existe, pour montrer qui on est: des individus, des citoyens qui devraient, quelle que soit leur orientation sexuelle, avoir les mêmes droits que tous. Enfin aujourd'hui, les mêmes droits que les hétérosexuels... Cet appel résulte d'un vote auprès des adhérents: c'est donc une décision qui vient largement de la base? Effectivement, même si nous avions déjà signé l'Appel inter-associatif au rassemblement devant l'Assemblée nationale du 7 novembre, nous n'avions pas suffisamment communiqué sur cet engagement, n'étions pas officiellement présents au rassemblement, et certaines associations membres nous l'avaient reproché. Dans les échanges que j'ai pu avoir ça et là, il est apparu que nos associations membres attendaient une réelle prise de position de la Fédération, qu'on les représente aussi sur ce terrain, qui est celui des droits pour les homosexuels et de la lutte contre les discriminations qui est, malheureusement, notre raison d'être. L'avocate du diable pourrait vous rétorquer que vous sortez là de votre rôle sportif... La position est toujours délicate car il ne s'agit pas de s'engager politiquement pour un parti ou un autre. Mais faire du militantisme est déjà un acte politique en soi. Avoir une fédération qui lutte contre les discriminations et milite pour une meilleure reconnaissance des homosexuels dans la société est un acte politique. Qu'on soit pour ou contre le mariage pour tous, concernés ou pas par la co-parentalité, la PMA ou la GPA, il en va des droits de milliers de citoyens qui aujourd'hui sont discriminés au nom d'une orientation sexuelle différente. Cela n'est pas juste et est insupportable. Ce projet de loi concerne peu ou prou l'ensemble de nos 3.500 adhérents. On se doit donc de les défendre, de les représenter et si la pratique sportive est notre faire-valoir, la lutte contre les discriminations, notamment liées à l'orientation sexuelle, est notre credo. «Il est important que les sportifs français sortent du bois, que nos artistes assument. Ils ont un rôle à jouer» Dans cet appel, la FSGL a souhaité notamment rappeler que «tous les citoyens naissent libres et égaux en droit». Cela semble être une évidence et, pourtant, dans tout ce que l'on entend ces derniers mois de la part des anti-mariage pour tous, ce postulat de départ semble avoir été oublié... C'est cela qui vous a le plus frappée? Oui, lorsque l'on a évoqué cet appel à manifester lors de notre comité fédéral, ce que nos associations nous ont exprimé très vite et très fort, c'est: on ne peut pas rester sans rien faire. Ce qui se dit dans la rue, dans les médias, les propos homophobes qui ont été tenus devant les caméras, tout ceci avait marqué les esprits et choqué certains qui avaient peur d'un retour arrière, d'un retour à des périodes où l'homosexualité était encore moins acceptée qu'aujourd'hui. On a l'impression que la parole a été largement laissée aux «anti-mariage» dans les médias et pas assez aux «pour». Parce qu'ils représentent une minorité de pensée? Toujours est-il que laisser le champ libre à cette expression présente un risque de recrudescence d'actes et de propos homophobes qui sont pourtant aujourd'hui punis par la loi. En cela, les récentes déclarations de Lilian Thuram, qui finalement dit la même chose, ont dû vous faire chaud au coeur? Entendre une personnalité de premier plan qui n'est a priori pas concernée directement par l'homophobie prendre fait et cause pour l'égalité des droits est toujours satisfaisant. C'est le cas avec nos parrains, Romain Mesnil pour le Tournoi International de Paris ou Laura Flessel pour la candidature de Paris à l'organisation des Gay Games en 2018 par exemple. C'est important d'avoir des personnalités reconnues qui se lèvent et disent: «Non! Cette discrimination est intolérable!» Une discrimination dans l'accès aux droits du fait de son orientation sexuelle parait réellement d'un autre temps. Elle ne se justifie pas par le droit naturel. Le droit est un ensemble de règles qui sont amenées à évoluer en fonction des usages constatés et acceptés. Il semble que le moment soit venu de faire évoluer ce droit. Vous aimeriez que davantage de sportifs entrent dans le débat? Les Anglo-Saxons parlent de «role model». C'est important quand on se découvre homosexuel de pouvoir en avoir une représentation positive. Que des personnalités politiques, du show-biz, de la télé, des intellectuels, des sportifs, dissimulent leur homosexualité laisse à penser que c'est une situation honteuse, que c'est mal, répréhensible et qu'il n'y a pas de voie dans la société pour un homosexuel aujourd'hui. C'est faux! Si on recensait toutes les personnes connues, écrivains, chanteurs, acteurs, sportifs, hommes politiques, qui sont ou étaient homosexuels, on verrait que leur carrière et leurs performances parlent pour eux. Être homosexuel n'est pas un frein à son développement personnel, à l'émancipation, à une vie sociale riche et épanouie. Ils sont là, partout, autour de nous! Ils se cachent! Mais l'absence de références publiques amène à l'introspection et au suicide de certains jeunes, dans le pire des cas. Alors oui c'est important, et plus que jamais, que nos sportifs français sortent du bois, que nos acteurs/actrices, chanteur/euses, assument. Parce qu'ils ou elles ont un rôle à jouer. Pour la société. Pour le bien-être d'une génération. Demain à Paris, si l'on veut venir marcher sous les couleurs de la FSGL, comment fait-on? Nous avons donné rendez-vous à nos adhérents à 13h45 sur les marches de l'Opéra Bastille, pour que nous défilions ensemble derrière notre banderole «Contre les discriminations, Faisons du sport ensemble». |
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