21/04/2009 Neuf Sénégalais condamnés en janvier à huit ans de prison ferme pour homosexualité devaient être libérés de prison, lundi, sur ordre de la Cour d'appel de Dakar qui a annulé la procédure judiciaire. Le président de la cour, Bara Niang, a publiquement annoncé que sa juridiction ordonnait l'annulation du «procès verbal d'enquête et de la procédure subséquente» et «la mainlevée des mandats de dépôt». Les neuf hommes, âgés de moins de 30 ans, avaient été condamnés le 7 janvier pour «acte impudique et contre nature et association de malfaiteurs» après avoir été arrêtés en décembre, à Mbao, à la périphérie de Dakar. «Ils vont sortir ce soir» de prison, s'est félicité un de leurs avocats, Me Biram Sassoum Sy, interrogé par l'AFP. Au cours du procès en appel, les défenseurs n'avaient pas abordé le fond. Ils avaient d'abord soulevé de «nombreuses exceptions de nullité» et rejeté toute idée de flagrant délit. «Suite à une dénonciation anonyme par téléphone, la police avait fait une descente en pleine nuit dans un appartement privé, et le principal accusé, dirigeant d'une association de lutte contre le sida, était allé ouvrir», a relaté l'un des avocats, Me Issa Diop, interrogé par l'AFP. «Il a été avancé que ces hommes avaient été trouvés en pleins ébats, mais c'est faux. La police a saisi des objets et des téléphones portables avec des photos, et s'est basée sur cela pour monter un dossier», a ajouté l'avocat. L'avocat général lui-même avait souligné qu'il ne s'opposait pas à l'annulation des actes juridiques. Au Sénégal, pays à 95% musulman, l'homosexualité est déniée et réduite à la clandestinité. Officiellement interdite, elle est passible d'un à cinq ans d'emprisonnement. Les neuf hommes, eux, avaient écopé d'une peine encore plus lourde: huit ans de prison et 500.000 francs CFA (760 euros) d'amende chacun, car leur condamnation pour «association de malfaiteurs» (comme s'ils s'étaient concertés pour un délit) avait alourdi la peine. «La justice sénégalaise a jugé en toute responsabilité et non pas en fonction d'injonctions extérieures», a estimé Me Sy, faisant allusion aux appels lancés par diverses organisations internationales pour leur libération. Le président français Nicolas Sarkozy avait également exprimé son «émotion» et sa «préoccupation» après leur condamnation. Le Malien Michel Sidibé, directeur du programme des Nations unies de lutte contre le sida, a accueilli la remise en liberté des neuf hommes comme «une victoire du droit pour combattre la criminalisation des homosexuels». «La question, c'est comment utiliser cela pour ouvrir un débat sur le fond: il est important pour nous d'exhorter tous les pays (...) à abroger les lois discriminatoires à l'encontre des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes», a-t-il ajouté. La Rencontre africaine pour la défense des droits de l'Homme (Raddho), ONG basée à Dakar, a appelé à débattre de «la dépénalisation totale de l'homosexualité». Dans leur très grande majorité, les Sénégalais approuvaient l'emprisonnement des neuf hommes, qualifiés de «goordjiguen» («homme-femme» en langue wolof), «impurs». «Il faut les supprimer!», entendait-on parfois. Le quotidien L'Observateur a cependant publié lundi un entretien avec l'universitaire sénégalais Cheikh Niang, expliquant que l'homosexualité «a existé dans toutes les sociétés». Le chercheur soulignait en tant que musulman: «je me suis dit que la diversité sexuelle n'était pas de mon fait, pas non plus du fait du juge, mais de Dieu» et que «l'on n'a pas le droit de tuer une personne que Dieu a faite». |
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