18/09/2009 REPORTAGE. A Belgrade, les militants des droits de l'homme -et l'homo de la rue- ne veulent pas céder à ceux qui menacent la gay pride, prévue ce dimanche, et qui s'annonce très tendue. Cela ressemble à une invitation à une soirée branchée, sous la forme de messages sur Facebook ou de courriels au contenu codé, expliquant à l'initié où il faut se rendre et à quelle heure. Mais les destinataires de ces messages mystérieux se connaissent pour la plupart et les lieux de réunion sont des boîtes de nuit, des appartements ou encore des bars, autant d'endroits où la communauté gay de Serbie aime à se retrouver en sécurité. Au «Toxic» à Belgrade, plusieurs dizaines de personnes dansent aux derniers rythmes de la musique techno. Les gardes surveillent de près les nouveaux venus pour éviter tout incident, qui ne sont pas rares. Le mois dernier encore, des jeunes gens masqués ont tenté, en vain, de lancer des gaz lacrymogènes à l'intérieur de l'établissement. «Moi je n'ai pas honte» «La Serbie est encore loin d'accepter les gays», soupire ce conseiller financier de 38 ans, qui ne veut pas révéler son identité, comme la plupart des personnes réunies ce soir-là au «Toxic». «Je n'ai pas honte de ce que je suis, mais l'environnement dans lequel je vis est homophobe et répugne à reconnaître mon identité sexuelle», ajoute-t-il. Lorsqu'il fit part de son homosexualité à ses parents, ceux-ci ne lui adressèrent plus la parole pendant plus de deux ans. C'est uniquement lorsque son père tomba sérieusement malade qu'il reprit contact avec lui. Lara, une enseignante de 27 ans, confie avoir dissimulé son identité si souvent qu'elle ne conçoit pas de l'évoquer en dehors de ses intimes. «Il m'aurait été impossible d'avoir ce travail si je leur avais dit la vérité. Je n'aurais pas pu louer un appartement avec ma compagne si nous n'avions pas menti, en expliquant que nous étions des soeurs. Le tout à l'avenant», explique la jeune femme. «Votre vie n'a plus de sens» «Si vous devez dissimuler chaque jour ce que vous êtes, mentir à tous par crainte des réactions de rejet ou de violence, maîtriser vos émotions à l'égard de votre partenaire dès que vous sortez, votre vie n'a alors plus de sens», commente le militant des droits homosexuels Predrag Azdejkovic. La plupart des gays et lesbiennes en Serbie ont préféré cacher leur identité sexuelle, dans un pays où les réactions conservatrices sont encore très fortes, en dépit de l'adoption récente d'une loi contre les discriminations. Défilé dimanche sous tensions La lesbian & gay pride prévue dimanche à Belgrade et les réactions d'hostilité qu'elle suscite illustrent les difficultés pour la communauté homosexuelle serbe à se faire accepter. Ses organisateurs espèrent d'ailleurs que la manifestation permettra d'attirer l'attention sur leur sort. Le défilé a reçu le soutien du ministère serbe pour les Droits de l'homme et les minorités et le ministre de l'Intérieur, Ivica Dacic, a promis que tout sera fait pour empêcher des incidents. Il a néanmoins reconnu que la manifestation serait «à hauts risques, comme il n'y en a pas eu depuis longtemps en Serbie», en raison de violences possibles de la part de milieux ultra-nationalistes ou de supporteurs de fooball. Des violences en 2001 La première lesbian & gay pride s'était achevée en 2001 dans la violence, la police n'étant pas parvenue à protéger les manifestants des assauts de hooligans. «Nous ne permettrons pas à ce défilé de la honte d'avoir lieu», a déjà averti Mladen Obradovic, du mouvement ultra-nationaliste «Obraz» (Honneur), connu pour ses coups de mains à l'encontre des milieux libéraux. Alors que certains pourraient décider de rester chez eux par crainte des violences, les militants de la cause homosexuelle en Serbie appellent au contraire les gays et lesbiennes à se faire voir et entendre. «Ce moment est décisif pour que la communauté homosexuelle et lesbienne surmonte ses peurs, souligne le militant Boris Milicevic, et que du rôle de victimes, que leur attribue la société, ils deviennent de véritables combattants en faveur de l'égalité des droits pour tous». L'Inter-LGBT vigilante En France, l'Inter-LGBT, l'association organisatrice de la Marche des fiertés LGBT de Paris, a déclaré dans un communiqué que «les LGBT serbes doivent pouvoir défiler en toute tranquillité». Elle réclame aux autorités d'assurerla sécurité des manifestants, et de mettre en pratique la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l'homme, qui prévoient un cadre pour la protection et le soutien dont doivent bénéficier les militants des droits humains. |
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