31/05/2010 Les militants russes ont enfin pu tenir une gay pride sans arrestations par la police. Mais au prix d'une logistique quasi militaire et en ne marchant que… cinq minutes chrono. Défiant des autorités hostiles, des militants de la cause homosexuelle ont réussi samedi pour la première fois à organiser brièvement et sans accroc une gay pride dans Moscou, au terme d'une insolente partie de cache-cache avec la police anti-émeute et grâce à une logistique «paramilitaire». Pour cette cinquième gay pride dans la capitale russe, interdite comme les précédentes par un maire ouvertement homophobe, les défenseurs des droits des homosexuels étaient déterminés à éviter la confrontation, ainsi que les arrestations et les coups qui ont coutume de l'accompagner. Jeu de cache-cache Annoncée de longue date, la journée avait pourtant mal commencé: vers 10h locales, les abords de la station de métro où rendez-vous avait discrètement été donné aux journalistes grouillaient déjà de policiers anti-émeute prêts à en découdre. En revanche, aucun militant gay n'était en vue. Forts de leur expérience, les organisateurs ont par la suite fait savoir qu'ils n'avaient jamais envisagé de mener l'action à cet endroit. Mais ils ont aussi reconnu ne pas avoir prévu que le jeu de cache-cache qui s'en est suivi occuperait militants, policiers et journalistes pendant toute la matinée, pour se solder par une gay pride d'à peine cinq minutes… Nécessité fait loi, ont-ils expliqué en substance: «Les années précédentes, (la police) avait réussi à nous pister. (…) On joue au chat et à la souris mais nous, nous sommes agiles comme des souris et malins comme des chats», s'amuse Louis-Georges Tin, militant français, fondateur de la Journée mondiale contre l'homophobie et la transphobie, venu spécialement à Moscou. «C'est paradoxal: pour un événement pacifique, nous sommes obligés d'avoir une organisation paramilitaire», souligne-t-il. De fait, nombre de journalistes venus couvrir l'événement ont été déconcertés par le jeu de piste dans lequel ils se sont retrouvés embarqués et qui les a entraînés successivement sur un parking de supermarché en banlieue, puis dans un long trajet en minibus sur le périphérique extérieur avant enfin de revenir au centre ville, où la parade s'est finalement déroulée près de la gare de Belorouskaïa. «Nous ne voulons pas une bagarre de plus» Cependant, les militants qui les menaient ont entretenu un savant mystère sur la suite des opérations. L'équipée a cependant été pimentée par l'apparition, à deux reprises, du principal organisateur de la parade, Nikolaï Alekseev, juché sur une moto dont le conducteur portait un masque et avait retourné la plaque d'immatriculation. Il s'est excusé pour les conditions singulières dans lesquelles se déroulait la parade, rendue, selon lui, nécessaires par l'interdit abusif des autorités et la nécessité de protéger les militants: «Nous voulons crier nos slogans, nous ne voulons pas juste montrer une bagarre de plus dans le centre de Moscou», a-t-il lancé sur le parking, avant de sauter à nouveau sur sa moto. Aucune arrestation Après environ quatre heures de partie de cache-cache, les journalistes ont finalement pu gagner au pas de gymnastique le lieu de la gay pride, somme toute assez modeste: une trentaine de jeunes militants au pas de course qui portaient un long drapeau aux couleurs de l'arc-en-ciel et scandaient des slogans. Mais à peine au bout de quelques minutes et de 200 mètres de parcours, l'«opération commando» a été déclarée terminée. Les militants ont replié à la hâte leur drapeau avant de s'égailler dans la nature. Ils ont gagné la partie de cache-cache: la police n'est arrivée sur place que dix minutes plus tard et aucune arrestation n'a eu lieu. |
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