20/03/2002 Après avoir repoussé par trois fois la date de son délibéré, la chambre sociale de la Cour d'appel de Montpellier a rendu public, hier matin, mardi 19 mars, son arrêt. Cette affaire de discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et de conduite homophobe de la part de deux pharmaciennes de Sète à l'encontre de Valérie Goudal, avait connu en janvier 2001, en première instance devant le Conseil des prud'hommes de Sète, une issue heureuse puisque les employeuses avaient été condamnées à verser à Valérie Goudal une somme totale de 80 000 F en raison de leur comportement, bien que le mot homophobie n'ait jamais été utilisé dans la décision prud'homale. Hier matin, cette affaire a connu un revirement jurisprudentiel inattendu. La Cour d'appel "ordonne en tant que de besoin" le remboursement de la somme de 80 000 F perçue par Valérie Goudal. En clair, cela signifie qu'elle ne sera obligée de rembourser cette somme que si les deux employeuses le demandent. Les motivations de cet arrêt sont stupéfiantes à plus d'un titre. Les juges professionnels de la Cour d'appel ont rejeté les attestations produites par Valérie Goudal au motif que celles de sa famille pouvaient être entachées de parti pris, que celles des clients habitant par exemple à Nice émanaient de clients de passage et que d'autres, dont celle particulièrement à charge pour les deux employeuses rédigée par un client habituel qui venait chercher sa trithérapie dans cette officine, étaient subjectives parce que ces personnes étaient elles-mêmes homosexuelles. Ce raisonnement a immédiatement fait réagir Hussein Bourgi, président du Collectif contre l'homophobie et pour l'égalité des droits, qui n'accepte pas "l'idée que les gays seraient considérés comme des sous-citoyens et que leurs témoignages seraient irrecevables." Cette incroyable motivation introduit une nouvelle discrimination dans une affaire de discrimination. Autre motivation, l'attestation d'une apprentie venant appuyer les dires de Valérie Goudal est rejetée au motif qu'elle a quitté la pharmacie avant que Valérie ne soit embauchée dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée. Selon ce raisonnement, cette femme ne pouvait témoigner valablement. Or, dans les pièces fournies au débat, Valérie Goudal avait pris soin d'expliquer qu'elle avait d'abord été embauchée en juin 1995, par intermédiaire de quatre contrats de travail à durée déterminée, le dernier signé le 1er septembre 1995. L'apprentie ayant quitté l'officine le 25 septembre 1995, il ne fait donc aucun doute, sauf pour les juges, que les deux femmes aient bien travaillé ensemble. Troisième motivation : sans apporter plus d'explication, les juges ont estimé qu'il n'y avait aucun lien de causalité entre le harcèlement dont se disait victime Valérie Goudal et son état dépressif, allant ainsi à l'encontre de tous les certificats médicaux attestant exactement du contraire. Enfin, il a été retenu contre Valérie Goudal une volonté de nuire à ses employeuses car, selon les juges, il appartient à l'employée victime de la discrimination de rapporter la preuve des manquements des employeuses. Or, cette affirmation va totalement à l'encontre de la jurisprudence, qui depuis l'automne dernier a renversé cette obligation de preuve. Aujourd'hui, le partage de la charge de la preuve est communément admis. Pour maître Kirkyacharian, "cette situation est choquante. Le juge ne prend pas en compte les intérêts de Valérie Goudal au centre de sa décision. Il pense à préserver ses intérêts. Il ne veut pas avoir à traiter ce contentieux du harcèlement existant du vivant du contrat de travail. D'où l'ensemble de ses motivations qui mettent en exergue un défaut de réponse, une dénaturation du contenu des attestations et une violation de la règle de droit." Tout d'abord abasourdie, Valérie Goudal s'est dite prête à "rebondir en étudiant l'éventualité d'un pourvoi en cassation". |
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