22/03/2011 INTERVIEW. Les lignes bougeraient-elles dans la très catholique et homophobe Pologne ? L'automne dernier, les électeurs de Varsovie ont envoyé un gay au conseil municipal. Elu sur la liste de l'opposition, Krystian Legiersky y voit le signe du changement pour les homos polonais. En obtenant, en novembre 2010, un siège de conseiller municipal à Varsovie, Krystian Legierski est devenu le premier élu ouvertement gay de Pologne. Juriste de formation, il a coécrit, en 2003, un projet de loi visant à introduire une union civile en Pologne. Il fut au centre du «stonewall polonais», lorsque la mairie de la capitale polonaise décida de fermer sa boîte de nuit gay en 2006. Depuis, il en a ouvert deux autres. avec un père mauritanien, Krystian Legierski est à la fois métis et gay. «Un mélange assez rare», souligne-t-il, dans un pays qui a du mal à devenir gay-friendly. Pensez-vous que, paradoxalement, votre élection puisse être due à votre homosexualité? Je pense que ma victoire veut dire deux choses. Tout d'abord, certains ont voté pour moi parce que je suis gay, ce qui montre l'éveil de la communauté LGBT et la prise de conscience de leurs droits par les homosexuels. Ensuite, d'autres ont voté pour moi bien que je sois gay, ce qui signifie que pour beaucoup l'homosexualité, même si elle n'est pas considérée comme normale, n'est pas une raison pour discriminer un candidat. Quels sont vos projets pour la communauté LGBT? J'aimerais que soit votée une loi introduisant l'union civile pour les couples homosexuels en Pologne. J'y travaille séparément de mon activité au conseil municipal. Faire voter une loi est un processus national et non local. À mon niveau, au conseil municipal de Varsovie, je souhaite travailler pour l'émancipation de la communauté LGBT. «Ma victoire montre qu'une part importante de la société polonaise est tolérante et n'a pas de préjugés.» Quelles ont été vos impressions après votre premier conseil municipal? J'ai le sentiment qu'il y a beaucoup de personnes intelligentes avec lesquelles j'espère travailler efficacement afin de trouver de bonnes solutions pour les habitants de Varsovie. Vous avez dit lors d'une interview qu'être gay et black était «un mélange assez rare dans la société polonaise, plutôt homogène». Est-ce que vous vous considérez comme un symbole? Dans un sens, oui. Je suis content que la Pologne, considérée par certains comme très croyante et intolérante, ait montré qu'elle a plusieurs facettes. C'est aussi un pays de progrès et d'ouverture d'esprit, doté d'une bonne énergie. Ma victoire montre qu'une part importante de la société polonaise est tolérante et n'a pas de préjugés. Notre tâche est d'emmener cette tranche de la société à la tête du débat public. Vous êtes donc optimiste pour les prochaines années? Bien sûr, cependant je n'oublie pas qu'un changement demande des efforts récurrents pour qu'il ne s'arrête pas en chemin et ne change pas de direction vers une situation pire encore qu'auparavant. L'histoire humaine est l'histoire de l'évolution constante de l'action, d'accomplissements incroyables et de déclins horribles. Dans ce sens, notre temps n'est pas différent d'autres moments d'une histoire vieille de plusieurs siècles. Par conséquent, nous devons toujours rester en alerte et être préparés à faire des compromis et même des sacrifices. Avec dix sièges au conseil municipal, l'opposition peut-elle faire changer les choses, à Varsovie même? Avec l'équilibre des forces actuel, nous ne pouvons pas faire jouer nos voix pendant le vote, mais en revanche ce que nous pouvons faire, c'est influencer l'opinion publique. Après la disparition du président Lech Kaczynski, pensez-vous que la Pologne va pouvoir faire mentir sa réputation de pays homophobe? Je le pense et l'espère. L'Union européenne a-t-elle un rôle à jouer dans cette évolution ou est-ce une question d'ordre interne que seuls les Polonais peuvent résoudre? Même si le rôle de l'Union européenne est très important, je pense que nous seuls, les Polonais, pouvons résoudre les problèmes de la communauté LGBT. Toute solution qui serait «imposée» par l'Europe, ou toute autre force extérieure au pays, n'apporterait pas de résultats satisfaisants dès lors que la majorité des Polonais ne change pas d'opinion et ne se débarrasse pas de ses préjugés et de ses mauvais raisonnements. Votre élection a été très bien reçue par la presse européenne et internationale. Est-ce le cas en Pologne? Oui. Quasiment tous les médias ont rapporté mon élection et je suis heureux de pouvoir affirmer que ma victoire a été reçue positivement. En juillet 2010, Varsovie a accueilli l'Europride. Une gay pride est-elle prévue cette année? Oui, et j'aimerais que la gay pride de 2011 soit l'occasion de lancer un débat public constructif, sans démagogie ni populisme dans la communauté. |
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