11/04/2011 Des militants exilés en Europe nous confient ce qu’ils attendent des révolutions qui secouent le Maghreb et le Moyen-Orient. Bilan: de l’espoir et pas mal d’appréhensions... Nazim est originaire d’une ville à quelques 700 km au Sud d’Alger. Une ville conservatrice qu’il a dû fuir après que son homosexualité a été découverte. «J’ai connu des persécutions physiques et morales, confie-t-il, ses lunettes noires chaussées sur le nez. Ce n’était pas mieux de partir, mais c’était obligé. Et ce n’est pas facile de quitter son pays, son monde: c’est comme si on se quittait soi-même, qu’on disparaissait pour renaître de ses cendres.» Demandeur d'asile en France depuis un an, le trentenaire suit de près les révolutions pro-démocratiques du monde arabe. Des révolutions auxquelles certains homos participent incognito: question de sécurité. Que revendiquent-ils? «Plus de libertés individuelles. Une fois que cette porte sera ouverte, on pourra y entrer. D’autant que les initiateurs des révolutions sont assez ouverts d’esprit. Maintenant, est-ce que ce sont eux qui vont écrire les nouvelles constitutions?», s’interroge Yahia, qui milite depuis la Belgique dans le groupe LGBT algérien AbuNawas. Accords tacites Kader, grand brun de 33 ans, «espère que les choses changeront vraiment» mais gage que le combat pour la cause est loin d’être gagné. Prenant pour exemple l’Algérie, où les manifestations restent de moindre ampleur, il explique: «Quand j’y retourne et que je discute du mariage des homos avec des gens qui ne savent pas que je suis homosexuel, ils disent: "Que Dieu nous protège de ça! C’est des gens qui ont un excès de liberté, alors ils tombent dans la perversité". Entendre ça dans la bouche de quelqu’un de plus ou moins cultivé, c’est grave…» Il évoque une peur profonde. «Ce que je crains, c’est que l’on doive combattre les personnes qui prônent la liberté aujourd’hui mais qui demain vont essayer de nous écraser au nom de la religion, de la culture, de la société», indique le bénévole de l'Association française pour la reconnaissance des droits des personnes homosexuelles et transsexuelles à l'immigration et au séjour (Ardhis) – avant de dénoncer les «accords tacites» selon lesquels seule l’homosexualité invisible est tolérée. Vers une ouverture? Sceptique sur les retombées du «printemps arabe», Nazim renchérit qu'il ne faut pas se tromper d'ennemi. «Ce n’est même pas la religion musulmane le problème: c’est la mentalité arabe, puisqu’on a le même problème dans les communautés copte et chrétienne», commente le jeune homme, issu d’une «classe professionnelle assez privilégiée». Comment changer cette mentalité? Kader estime que le «printemps arabe» doit entre autres se solder par une ouverture, un travail qu’il évalue à plusieurs années. «Ça va donner la possibilité aux gens de s’éduquer, de se mélanger, de voir d’autres cultures, de ne pas être isolé, de comprendre que l’homosexualité peut exister…» Et qu’elle n’est pas une maladie. «On nous conseille une panoplie de séances d’exorcisme, de psychologie, de psychiatrie, regrette Nazim. Qu’ils arrêtent de considérer l’homosexuel comme un malade! Si on arrive à avoir ça – même si on n’arrive pas à avoir des droits communs, comme le mariage – ce sera déjà un pas énorme.» |
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