21/05/2011 Pour le professeur Gilles Pialoux, la récente étude qui montre que les séropos sous traitement sont moins contaminants ne prend pas assez en compte la sexualité gay pour qu'on l'extrapole aux homos. Mais d'autres résultats vont dans le même sens. Quelques jours après l'annonce des résultats d'un essai qui montre que les séropositifs, traités précocement, sont bien moins contaminants, le professeur Gilles Pialoux tempère l'enthousiasme. Pour cet expert français, chef de service des maladies infectieuses et tropicales à l'hôpital Tenon, il faut conduire d'autres recherches, plus communautaires. Cet essai démontre-t-il que les séropositifs sont bien moins contaminants en prenant un traitement tôt, ou en général, dès que leur charge virale est indétectable? Gilles Pialoux: Cet essai confirme que le traitement contre le VIH, par le contrôle de la charge virale qu'il induit, est désormais un outil de prévention de la transmission sexuelle du VIH, c'est ce qu'on appelle le TasP (treatment as prevention). C'est une donnée statistique indiscutable avec des taux élevés de réduction du risque: 92% pour l'essai Attia, 97% pour HPTN 052, l'essai dont les résultats viennent d'être communiqués. Mais attention, la transposition d'une donnée collective et statistique à l'échelon individuel est complexe. Et avec ce type d'essai, on manque encore de données chez les HSH, les hommes ayant des rapports sexuels avec les hommes. Je n'ai pas les détails des inclusions dans cet essai mais il me semble que le choix des 13 centres où il s'est déroulé (Afrique, Asie, Amériques) notamment en Afrique du Sud orientait clairement le recrutement vers les couples hétérosexuels. Justement, cette protection vaut-elle pour les couples homo sérodifférents, a-t-on vérifié que la sodomie était aussi peu à risque que la pénétration vaginale? Non, le chiffre n'est malheureusement pas extrapolable aux couples homos... Notamment pour la différence de risque de transmission du VIH par acte sexuel: ce risque est nettement plus important pour un rapport anal que pour un rapport vaginal, c'est une différence qui est parfaitement identifiée. Mais on n'imagine pas que le TasP ne puisse pas avoir un impact sur la transmission du VIH aussi chez les homos. La question est celle là: quel est le niveau de protection à l'échelle d'une population? Il existe d'autres données issues des études de charge virale communautaire, à San Francisco notamment qui montrent que lorsqu'on augmente le taux de gays dépistés, traités et ayant une charge virale contrôlée, le nombre de nouvelles contaminations baisse! L'étude de la sodomie chez les couples sérodifférents hétérosexuels inclus dans ces essais sera aussi une information. On attend par exemple l'examen de ces données dans les études de l'essai Prep (Caprisa 004), un essai de traitement pré-exposition, conduit en Afrique avec un gel vaginal de tenofovir. Ces résultats doivent-ils mener à la mise en place de stratégie de «test and treat», en France, le plus vite possible? Oui, cela doit être évalué en France, par l'Agence nationale de recherche contre le sida (ANRS), avec les associations de lutte contre le sida et les associations LGBT, avec des essais d'intervention combinée incluant les notions de TasP et de charge virale communautaire. Avec France Lert *, nous avions présenté un pré-projet dans ce sens, «Intervagay» devant le conseil scientifique de l'ANRS il y quelques mois. Mais cela s'avère plus complexe à monter en France qu'à Vancouver ou à San Francisco. *France Lert, directrice de l'unité Inserm 687, est la co-auteure du rapport «Prévention et réduction des risques dans les groupes à haut risque vis-à-vis du VIH et des IST» publié en novembre 2009 et écrit avec Gilles Pialoux. |
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