02/08/2011 Au collège, au lycée, dans les bibliothèques scolaires, l’informatique rejette toute demande de connexion à Têtu.com. Un blocage qui a étonné de nombreux lecteurs mais qui s’explique: à cause de sa thématique homo, le site du magazine figure sur une «liste noire». En 2008, déjà, le cabinet du ministre de l'Éducation nationale Xavier Darcos avait accepté de se pencher sur le sujet, au nom du pluralisme de la presse. Trois ans après, Têtu.com est toujours inaccessible. A l'Éducation nationale, un ministre plus tard, on ne s'étonne pas. Tout en refusant de communiquer sur le sujet, on explique que les élèves n'auraient «pas non plus accès à l'Équipe.fr». Officiellement donc pas de discrimination. Pourtant, Têtu.com semble bénéficier d'une exception. Depuis sept ans, le site figure sur une «liste noire». Un sytème baptisé «Liste noire» En 2004, le même Xavier Darcos, alors ministre délégué à l'Enseignement scolaire, décide de mettre en place le S2I2E (Service intranet internet des établissements et des écoles). Ce système instaure entre autres des «listes noires» de sites pour encadrer l'accès des élèves à internet. Il reprend ainsi un outil déjà existant, mis en place à l'université de sciences sociales de Toulouse et reconnu comme l'un des plus performants. Ce système baptisé «Liste noire» regroupe en fait les adresses des sites - les URL - en cinquante catégories: les contenus sectaires, violents ou pornographiques, les sites destinés aux enfants, aux bibliothèques, d'autres consacrés aux people, à l'actualité... En fonction du contexte pédagogique, du lieu ou de l'âge, l'accès à telle ou telle catégorie est interdit ou autorisé. Les sites d'information, y compris celui du quotidien sportif L'Équipe, peuvent par exemple être accessibles en «liste blanche» dans des bibliothèques. Mais selon cette base, Têtu.com apparaît parmi les sites... pornographiques. À l'heure où le ministère lance une nouvelle campagne de lutte contre les discriminations, l'amalgame est fâcheux. Du côté de l'université de Toulouse qui gère toujours la base de données, on reconnaît que Têtu.com est un cas délicat. «C'est une requête que l'on a régulièrement, admet Fabrice Prigent, le créateur du système. Mais, techniquement, j'ai un problème.» Le classement repose en effet sur le travail de dizaines de contributeurs français et étrangers, mais surtout sur un robot. Celui-ci traite des milliers d'URL qu'il classe en analysant essentiellement le texte: «À sa création, on lui a en quelque sorte appris à travailler sur différents sites, pornographiques ou non, explique l'informaticien. Le robot en déduit par exemple que "rose" ou "sein" sont assez récurrents sur des sites adultes et que "cancer" ne l'est pas. Ensuite, il évalue chaque site et fixe une note.» Au-delà d'une certaine note, les sites sont automatiquement classés comme «adulte». Un contrôle a posteriori peut avoir lieu ensuite. Les sites d'éducation à la sexualité sont par exemple redirigés dans une catégorie spécifique. Mais pas Têtu.com ! Moyens du bord «Il faut concevoir cela à un niveau scolaire. Il y a par exemple une règle stricte: les images de nudité ne peuvent pas être destinées à des enfants!», justifie Fabrice Prigent. Il reconnaît cependant qu'un classement plus détaillé par rubrique ou par page pourrait exister: «Si l'équipe était plus importante, il pourrait y avoir une catégorisation plus précise, comme c'est le cas aux États-Unis. J'ai créé cet outil il y a dix ans pour encadrer la navigation de mes étudiants. Ce n'est qu'ensuite qu'il a été récupéré. On m'a dit que j'étais un bon petit soldat mais la structure n'a pas évolué. Chez nous, la classification est faite avec les moyens du bord. Je fais toujours cela sur mon temps libre.» Mais dans cette catégorie «adulte» ou figure près d'un million d'URL, on trouve d'autres sites internet dont la place peut être contestée, dont plusieurs traitent de l'homosexualité. C'est le cas du site du GAGL, le Groupe Action Gay et Lesbien Loiret, qui ne présente aucune image de nudité. «Cette association a reçu l'agrément de l'académie d'Orléans-Tours pour conduire les campagnes de lutte contre l'homophobie en milieu scolaire. Et pourtant leur site est bloqué!», déplore Olivier Lelarge en charge des questions LGBT à la FSU. Le site SOS homophobie ou celui de l'association Le Mag ne seraient, eux, accessibles que depuis peu. Et dans un autre genre, l'association Les Bleuets, gérée par les très respectables sœurs oblates de Saint-François de Sales ne résiste pas davantage à ce tri très ou trop efficace. A l'université de Toulouse, on se dit néanmoins disposé à établir un filtrage plus précis pour le site Têtu.com. Une révision qui semble nécessaire, d'autant que le travail de ces bénévoles est aujourd'hui utilisé dans bon nombre d'organismes publics. La fameuse liste noire est même reprise par... des sociétés qui proposent un service de gestion internet aux entreprises. |
Webmaster / Éditeur : Monclubgay.com © | Réalisation : Nichetoo.net | ||
Conditions d'utilisation |
|